Trente-cinq espèces sauvages canadiennes, des rorquals aux mousses, ont été évaluées comme étant en péril lors de la récente réunion du COSEPAC (Comité sur la situation des espèces en péril au Canada) à Kananaskis, en Alberta, du 29 avril au 4 mai 2012. Encore une fois, la perte de l’habitat représente la menace la plus commune pesant sur les espèces sauvages canadiennes, mettant ainsi en évidence le fait que toutes les espèces, et non seulement les nôtres, ont besoin d’un habitat sain pour assurer leur survie.
Les poissons subissent une pression accrue découlant de l’habitat en déclin
La perte et la dégradation de l’habitat représentent la cause la plus commune du déclin des espèces à l’échelle mondiale, et les poissons d’eau douce du Canada ne font pas exception. Les poissons d’eau douce ne sont pas les seuls à compter sur les cours d’eau et les rivières; une très grande partie de la biodiversité canadienne comprenant les oiseaux, les insectes, les plantes ainsi que les amphibiens dépendent d’habitats aquatiques sains. Sept poissons d’eau douce ont été évalués par le COSEPAC comme étant en péril au Canada. Ces derniers incluent le chat-fou du Nord, le fondule rayé, le petit-bec et le méné à grandes écailles, tous se retrouvant dans le sud-ouest de l’Ontario. Dans cette région, la rivière Sydenham à elle seule accueille un grand nombre d’espèces additionnelles évaluées antérieurement par le COSEPAC comme étant en péril. Ces espèces incluent trois autres poissons d’eau douce, cinq moules et la tortue-molle à épines. Dans chaque situation, la perte ou la dégradation de l’habitat était le facteur déterminant pour la désignation. Bien que certains aspects de la qualité de l’eau dans la rivière Sydenham se soient améliorés grâce à la réglementation environnementale qui limite la pollution industrielle de la rivière, l’habitat de ces espèces de poissons non commerciales et d’autres espèces demeure menacé par les intrants agricoles et l’urbanisation. La biodiversité unique de cette région ne s’améliorera qu’avec un suivi minutieux et une protection rigoureuse de l’habitat des poissons.
Un symbole canadien fait face à un avenir incertain
Peu d’espèces peuvent rivaliser avec l’ours grizzli en tant qu’emblème du milieu sauvage canadien. Bien que l’ours grizzli soit au moins deux fois plus fort que l’humain moyen, en réalité il court le risque de payer de sa propre vie lors de l’interaction de nos deux espèces. Au cours du dernier siècle, la mortalité causée par les humains et l’habitat en déclin ont réduit l’aire de répartition mondiale de l’ours grizzli de plus de 50 %. Aujourd’hui, le Canada a une importante responsabilité de protéger les populations restantes d’ours grizzlis. Dans la partie sud de leur aire de répartition, où ils sont régulièrement en contact avec les humains, de nombreuses populations sont en déclin. Dans la partie nord, les impacts de l’extraction continue et de plus en plus intense des ressources naturelles sont une source de préoccupation. Étant donné ces menaces, l’ours grizzli a été évalué par le COSEPAC comme « espèce préoccupante ». Cette évaluation conclut un processus de deux ans ayant incorporé la science et les connaissances traditionnelles autochtones.
L’énigmatique anguille d’Amérique nage à contre-courant
AL’anguille d’Amérique est un poisson remarquable. Elle passe une grande partie de sa vie en eau douce puis retourne en mer, migrant à partir de cours d’eau et de rivières situés entre le Groenland et l’Amérique du Sud pour frayer dans la mer des Sargasses dans le milieu de l’Atlantique. Les anguilles juvéniles se déplacent sur plus de 7 000 km vers les rivières et les cours d’eau où elles vivent jusqu’à 20 ans avant d’entreprendre leur migration vers la mer. Ce mode de vie complexe expose l’anguille à une diversité de menaces en raison de l’étendue et de la durée de son déplacement, ce qui a mené à une désignation d’« espèce menacée ». L’anguille d’Amérique qui migre vers le lac Ontario et le haut Saint-Laurent a fait l’objet d’un déclin dramatique au cours des 40 dernières années. Malgré les améliorations apportées aux barrages hydro-électriques qui réduisent les risques pour les anguilles juvéniles en montaison, les anguilles plus âgées connaissent un taux de mortalité élevé durant leur descente. Dans le Canada atlantique, la pêche existante ajoute une pression additionnelle sur l’anguille d’Amérique.
L’autre castor du Canada ne peut supporter la chaleur
Bien que presque toute la population canadienne puisse reconnaître le castor d’Amérique du Nord, son cousin lointain, le castor de montagne est probablement peu connu de la plupart des gens. Au Canada, le castor de montagne se retrouve seulement dans la chaîne Côtière et au sud du fleuve Fraser en Colombie-Britannique. Le castor de montagne, le dernier représentant vivant d’une ancienne lignée de rongeurs, a été évalué comme « espèce préoccupante ». Ce castor vit dans des terriers souterrains creusés profondément dans un sol meuble le long des bords de cours d’eau tempérée et boisés. Ces sites peuvent être dégradés par les pratiques forestières qui tassent le sol. Le castor de montagne tolère très peu la chaleur et la sécheresse et est particulièrement vulnérable aux changements climatiques. La limace à grand manteau, une autre espèce sauvage évaluée comme « espèce préoccupante », est restreinte de façon similaire aux bords de cours d’eau tempérée et aux sources de suintement et doit faire face aux menaces découlant de l’exploitation forestière et des changements climatiques.
Aucun moyen d’éviter les impacts anthropiques
Les espèces du Nord et celles qui vivent dans l’océan devraient être protégées des activités humaines car plus des deux tiers de toute la population canadienne vit dans les 200 km de notre frontière sud; ce qui n’est pas le cas pour de nombreuses espèces sauvages canadiennes. Tel que pour l’ours grizzli, dont les déplacements sont de plus en plus perturbés par l’empiètement humain dans les régions boréales et arctiques, d’autres espèces du Nord et marines vivent sous le spectre des activités humaines. Dans le cas du Bécasseau roussâtre, un oiseau de rivage évalué comme « espèce préoccupante », l’exploration accrue des ressources dans son site de nidification de l’Arctique canadien représente une menace. Le Guillemot marbré, évalué comme « espèce menacée », est un oiseau plongeur remarquable qui se trouve au Canada le long de la côte de la Colombie-Britannique où il est vulnérable à la perte des forêts anciennes au sein desquelles il niche. Dans le milieu marin où les guillemots se nourrissent, l’augmentation proposée du trafic maritime constitue une menace additionnelle. Sur la côte de l’Atlantique, la tortue luth se heurte à des engins de pêche lorsqu’elle se nourrit dans les eaux canadiennes. L’enchevêtrement dans les lignes de pêche et les cordes attachées aux pièges représente une importante menace pour cette espèce sauvage, évaluée par le COSEPAC comme espèce « en voie de disparition ». Ces espèces démontrent comment les espèces sauvages canadiennes dépendent fortement de la protection de leur habitat.
Prochaine réunion
La prochaine réunion d’évaluation des espèces sauvages du COSEPAC sera tenue à Ottawa, en Ontario, en novembre 2012.
À propos du COSEPAC
Le COSEPAC évalue la situation des espèces, des sous-espèces, des variétés ou d’autres principales unités de la biodiversité à l’état sauvage considérées comme étant en péril au Canada. Pour ce faire, le COSEPAC se sert de connaissances scientifiques, traditionnelles autochtones, ou des collectivités, lesquelles sont fournies par de nombreux spécialistes provenant des gouvernements, des universités et d’autres organismes. Les sommaires d’évaluations sont actuellement à la disposition du public sur le site Web du COSEPAC et seront transmis à l’automne 2012 au ministre fédéral de l’Environnement pour une considération de l’inscription en vertu de la Loi sur les espèces en péril (LEP). À compter de cette date, les rapports de situation et les sommaires du statut seront mis à la disposition du public dans le Registre public des espèces en péril.
Il y a maintenant 668 espèces sauvages inscrites aux diverses catégories de risque du COSEPAC, y compris 297 espèces en voie de disparition, 159 espèces menacées, 190 espèces préoccupantes et 22 espèces disparues du pays (c.-à-d. on ne les trouve plus à l’état sauvage au Canada). En plus de ces espèces sauvages inscrites aux catégories de risque du COSEPAC, 15 espèces sont désignées comme étant disparues.
Le COSEPAC est composé de membres provenant de chaque organisme responsable des espèces sauvages des gouvernements provinciaux et territoriaux, de quatre organismes fédéraux (le Service canadien de la faune, l’Agence Parcs Canada, Pêches et Océans Canada et le Musée canadien de la nature), de trois membres scientifiques non gouvernementaux et des coprésidents des Sous-comités de spécialistes des espèces et des connaissances traditionnelles autochtones.
Définitions de la terminologie et des catégories de statut du COSEPAC :
Espèce sauvage : Espèce, sous-espèce, variété ou population géographiquement ou génétiquement distincte d’animal, de plante ou d’un autre organisme d’origine sauvage (sauf une bactérie ou un virus) qui est soit indigène du Canada ou qui s’est propagée au Canada sans intervention humaine et y est présente depuis au moins cinquante ans.
Disparue (D) : Espèce sauvage qui n’existe plus.
Disparue du pays (DP) : Espèce sauvage qu’on ne trouve plus à l’état sauvage au Canada, mais qu’on trouve ailleurs.
En voie de disparition (VD) : Espèce sauvage exposée à une disparition de la planète ou à une disparition du pays imminente.
Menacée (M) : Espèce sauvage susceptible de devenir « en voie de disparition » si rien n’est fait pour contrer les facteurs menaçant de la faire disparaître.
Préoccupante (P) : Espèce sauvage qui peut devenir « menacée » ou « en voie de disparition » en raison de l'effet cumulatif de ses caractéristiques biologiques et des menaces reconnues qui pèsent sur elle.
Non en péril (NEP) : Espèce sauvage qui a été évaluée et jugée comme ne risquant pas de disparaître étant donné les circonstances actuelles.
Données insuffisantes (DI) : Catégorie qui s’applique lorsque l’information disponible est insuffisante (a) pour déterminer l’admissibilité d’une espèce sauvage à l’évaluation ou (b) pour permettre une évaluation du risque de disparition de l’espèce sauvage.
Espèce en péril : Espèce sauvage qui a été évaluée comme étant disparue du pays, en voie de disparition, menacée ou préoccupante.
Marty L. Leonard (Ph.D.) Présidente, COSEPAC Department of Biology Dalhousie University |
Questions d’ordre général : Secrétariat du COSEPAC Service canadien de la faune Environnement et Changement climatique Canada 351, boul. St-Joseph, 16e étage Gatineau (Québec) K1A 0H3 Téléphone : 819-938-4125 Télécopieur : 819-938-3984 Cosepac |
Questions sur les mammifères marins (rorqual bleu) : Randall Reeves (Ph.D.) Okapi Wildlife Associates Telephone: (450) 458-6685 |
Questions sur les mammifères terrestres (castor de montagne, ours grizzli) : Dr. Justina C. Ray Wildlife Conservation Society Canada Telephone: 416-850-9038 x 22 |
Questions sur les oiseaux (Bécasseau roussâtre, Bruant de Baird, Guillemot marbré, Paruline à capuchon, Petit-duc des montagnes) : Jon McCracken Bird Studies Canada Telephone: 519-586-3531 (ext. 115) |
Questions sur les amphibiens et reptiles (couleuvre à nez mince du Pacifique, couleuvre agile bleue, salamandre sombre du Nord, tortue de l'Ouest, tortue luth) : Ronald J. Brooks (Ph.D.) College of Biological Science University of Guelph Telephone: (519) 836-8817 |
Question sur les poissons d'eau douce (anguille d'Amérique, chat–fou du Nord, épinoche à trois épines benthique et limnétique du lac Enos, fondule rayé, méné à grandes écailles, méné des plaines, petit–bec) : Eric B. (Rick) Taylor (Ph.D.) Department of Zoology University of British Columbia Telephone: (604) 822-9152 |
Question sur les poissons marins (raie à queue de velours, raie épineuse) : Alan F. Sinclair Telephone: (250) 714-5690 |
Questions sur les arthropodes (insectes et groupes taxinomiques connexes) (amiral de Weidemeyer, bleu insulaire, porte–queue de Colombie–Britannique) : Paul Catling (Ph.D.) Agriculture Canada Telephone: (613) 759-1373 |
Questions sur les mollusques (limace à grand manteau) : Dr. Dwayne Lepitzki Telephone: (403) 762-0864 |
Questions sur les plantes (cryptanthe minuscule, lophiolie dorée) : Bruce Bennett Yukon Conservation Data Centre Telephone : 867-667-5331 |
Questions sur les mousses et lichens (fabronie naine, ptychomitre à feuilles incurvées, scoulérie à feuilles marginées) : René Belland (Ph.D.) University of Alberta Telephone: (780) 987-3054 ext. 2240 |
Questions sur les connaissances traditionnelles autochtones : Donna Hurlburt (Ph.D.) Telephone: (902) 532-1341 |